Fecisti viriliter, et confortatum est cor tuum.
« Tu as agi virilement et ton cœur n'a pas eu peur. »
(Judith, XV, II.)
Un soldat vendéen était en sentinelle...
Sous son large chapeau tombaient cheveux soyeux ;
Sa beauté de vingt ans, la douceur de ses yeux,
Cachaient d'un vieux guerrier la brûlante étincelle.
Scrutant de ses regards les buissons, les chemins,
Il était là pensif, à côté d'un vieux chêne ;
Sur sa lèvre, on voyait un sourire de haine ;
Il tenait son fusil de ses deux jeunes mains.
Un bruit confus soudain vint frapper son oreille :
Il entendit des voix ; les branches se froissaient...
Et vit sur des chevaux quatre Bleus qui passaient,
Couverts encor du sang qu'ils répandaient la veille.
Notre petit soldat releva son fusil
Et fit tomber à terre un ancien capitaine.
«Rendez-vous ! cria-t-il, troupe républicaine ;
Halte-là ! rendez-vous ! les brigands sont ici ! »
Les Bleus surpris, troublés, le cœur battu d'alarmes,
Croyant être entourés de milliers de soldats,
S'arrêtent en criant : « Nous ne résistons pas. »
Et le Vendéen dit : « Alors, jetez vos armes !
« Et maintenant encor, descendez de cheval !
Si l'un de vous hésite, il verra ma colère :
Descendez !... » Et les Bleus ont déjà pied à terre...
« Bien ! je vais vous conduire à notre général. »
Les trois Bleus s'avançaient, dévorés par la rage
De se voir prisonniers aux mains d'un jeune enfant.
Et le petit soldat les suivait triomphant.
« Général, regardez, dit-il, c'est mon ouvrage ! »
Et le chef répondit : « C'est le fait d'un ancien.
Je te proclame, enfant, digne de la famille. »
Puis, s'adressant aux Bleus : « Par la main d'une fille,
Être vaincus, soldats, diable, ce n'est pas bien ! »
Dom Joseph Roux, Souvenirs du bocage vendéen (1898)
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