Et factae sunt famosae mulieres.
« Et ces femmes devinrent célèbres. »
(Ezech., XXII, 10.)
On avait tout détruit, rien ne restait debout,
Sous la marche des Bleus de sinistre mémoire.
Le pays de Vendée était en feu partout...
Ses pauvres habitants avaient passé la Loire.
Blessés, exténués, tourmentés par la faim,
Ces guerriers généreux avaient perdu courage.
Les défenseurs du roi tombaient sur le chemin,
Comme les feuilles d'arbre un jour de grand orage.
L'ennemi les suivait, aveuglé de fureur,
Tigre avide de sang, monstre impur et rapace,
Qui croyait un devoir de se montrer sans cœur,
De massacrer toujours, sans jamais faire grâce.
L'ennemi les suivait, en commettant le vol,
Des crimes sans exemple et d'horribles blasphèmes.
Les Vendéens campaient dans les plaines de Dol,
Se croyant arrivés à leurs moments suprêmes.
Or, les républicains, voulant anéantir
Les derniers Vendéens, livrèrent la bataille ;
« Il n'est plus de Vendée ! » entendait-on rugir.
Pourtant dans l'héroïsme il n'est rien qui défaille.
Westerman et Marceau, l'intrépide Kléber,
Qui de ses Mayençais veut venger la défaite,
Delâage, puis Amey, Rossignol et Muller,
Attaquent, enchantés d'être à pareille fête.
La Rochejaquelein, Marigny, Beauvolliers,
Talmont et Fleuriot, Stofflet, cette âme forte,
Dirigent la Vendée... Avec ces chevaliers
La bravoure des Blancs n'est pas encore morte.
Il était environ six heures du matin ;
Partout le canon gronde et le combat s'engage...
La plaine retentit ; l'écho, dans le lointain,
Redit les bruits du fer et les cris du carnage.
Pendant un jour entier, un combat acharné,
Un combat de géants, une lutte sanglante,
Tint le Blanc et le Bleu l'un à l'autre enchaîné,
Tous deux pleins de colère et de haine brûlante.
Cependant vers le soir, fatigués, abattus,
Devant leurs ennemis les Vendéens faiblissent.
Les Bleus reprennent force, ils se sont bien battus ;
Et du succès déjà leurs rangs s'enorgueillissent.
Oui, dans l'âme des Blancs, la vaillance trembla ;
Un instant on les vit qui jetaient bas leurs armes.
Mais leurs femmes en pleurs crièrent : « Halte-là !
Retournez au combat, lâches, voyez nos larmes !
« Vous fuyez, Vendéens, vous ne passerez pas !
Ou vous mettrez le pied sur le corps de vos mères,
Sachez que du Seigneur vous êtes les soldats...
Vous devez le défendre et venger ses colères.
« Quoi ! félons, on dirait qu'un jour vous avez fui !
Que vous avez été moins braves que vos femmes !
Reprenez le combat et soyez aujourd'hui
Vainqueurs de vos bourreaux. Allons ! en haut les âmes ! »
Ainsi, feu dans les yeux, parlaient aux Vendéens
Mesdames de Bonchamps, Donissan, de Lescure,
Et bien d'autres encor. Sur les républicains,
Leur courage devait laver plus d'une injure.
Et ces femmes alors, obéissant à Dieu,
Saisissent des fusils, d'abord les Poitevines,
Chargent les ennemis et font le coup de feu...
L'ardeur de Jeanne d'Arc embrase leurs poitrines...
Les Vendéens émus sentent battre leurs cœurs...
Rongés par le remords, en voyant ces chrétiennes,
Ils reprennent la lutte... ils retournent vainqueurs
En jetant aux échos : « Vivent les Vendéennes ! »
Dom Joseph Roux, Souvenirs du bocage vendéen (1898)
« Et ces femmes devinrent célèbres. »
(Ezech., XXII, 10.)
On avait tout détruit, rien ne restait debout,
Sous la marche des Bleus de sinistre mémoire.
Le pays de Vendée était en feu partout...
Ses pauvres habitants avaient passé la Loire.
Blessés, exténués, tourmentés par la faim,
Ces guerriers généreux avaient perdu courage.
Les défenseurs du roi tombaient sur le chemin,
Comme les feuilles d'arbre un jour de grand orage.
L'ennemi les suivait, aveuglé de fureur,
Tigre avide de sang, monstre impur et rapace,
Qui croyait un devoir de se montrer sans cœur,
De massacrer toujours, sans jamais faire grâce.
L'ennemi les suivait, en commettant le vol,
Des crimes sans exemple et d'horribles blasphèmes.
Les Vendéens campaient dans les plaines de Dol,
Se croyant arrivés à leurs moments suprêmes.
Or, les républicains, voulant anéantir
Les derniers Vendéens, livrèrent la bataille ;
« Il n'est plus de Vendée ! » entendait-on rugir.
Pourtant dans l'héroïsme il n'est rien qui défaille.
Westerman et Marceau, l'intrépide Kléber,
Qui de ses Mayençais veut venger la défaite,
Delâage, puis Amey, Rossignol et Muller,
Attaquent, enchantés d'être à pareille fête.
La Rochejaquelein, Marigny, Beauvolliers,
Talmont et Fleuriot, Stofflet, cette âme forte,
Dirigent la Vendée... Avec ces chevaliers
La bravoure des Blancs n'est pas encore morte.
Il était environ six heures du matin ;
Partout le canon gronde et le combat s'engage...
La plaine retentit ; l'écho, dans le lointain,
Redit les bruits du fer et les cris du carnage.
Pendant un jour entier, un combat acharné,
Un combat de géants, une lutte sanglante,
Tint le Blanc et le Bleu l'un à l'autre enchaîné,
Tous deux pleins de colère et de haine brûlante.
Cependant vers le soir, fatigués, abattus,
Devant leurs ennemis les Vendéens faiblissent.
Les Bleus reprennent force, ils se sont bien battus ;
Et du succès déjà leurs rangs s'enorgueillissent.
Oui, dans l'âme des Blancs, la vaillance trembla ;
Un instant on les vit qui jetaient bas leurs armes.
Mais leurs femmes en pleurs crièrent : « Halte-là !
Retournez au combat, lâches, voyez nos larmes !
« Vous fuyez, Vendéens, vous ne passerez pas !
Ou vous mettrez le pied sur le corps de vos mères,
Sachez que du Seigneur vous êtes les soldats...
Vous devez le défendre et venger ses colères.
« Quoi ! félons, on dirait qu'un jour vous avez fui !
Que vous avez été moins braves que vos femmes !
Reprenez le combat et soyez aujourd'hui
Vainqueurs de vos bourreaux. Allons ! en haut les âmes ! »
Ainsi, feu dans les yeux, parlaient aux Vendéens
Mesdames de Bonchamps, Donissan, de Lescure,
Et bien d'autres encor. Sur les républicains,
Leur courage devait laver plus d'une injure.
Et ces femmes alors, obéissant à Dieu,
Saisissent des fusils, d'abord les Poitevines,
Chargent les ennemis et font le coup de feu...
L'ardeur de Jeanne d'Arc embrase leurs poitrines...
Les Vendéens émus sentent battre leurs cœurs...
Rongés par le remords, en voyant ces chrétiennes,
Ils reprennent la lutte... ils retournent vainqueurs
En jetant aux échos : « Vivent les Vendéennes ! »
Dom Joseph Roux, Souvenirs du bocage vendéen (1898)
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