jeudi 29 septembre 2011 | By: Mickaelus

Charette



Dans les murs, hors des murs, tout parle de sa gloire.
(Corneille, Horace.)


C'était un chevalier. Il avait dans le cœur,
Ainsi que ses aïeux, la bravoure et l'honneur.
Comme eux il ressentait, dans sa noble poitrine,
Pour le trône et l'autel une flamme divine.

C'était un chevalier, un autre Godefroy,
Un aimable Tancrède, un Bayard sans effroi ;
Fièrement son blason portait cette devise :
« Tout mon sang pour le Roi, pour le Christ et l'Église. »

C'était un chevalier, un descendant des preux ;
Il allait au combat et triomphait comme eux.
Il sut gagner de même un rayon de la gloire,
En signant de son sang sa page dans l'histoire.

Le baron de Charette était un grand guerrier ;
La valeur, à son front, sut mettre le laurier
Du courageux soldat, du brave capitaine,
Le laurier qui verdit au souffle de la haine.

C'était un grand guerrier : sans cesse il imita
Scipion, Fabius, ou l'ardent Jugurtha.
Et, comme ce dernier qui luttait en Afrique,
Charette ainsi luttait contre la République.

Sa tête est mise à prix... Il ne veut point de paix.
Intrépide lutteur et ne comptant jamais
Le nombre d'ennemis avant de les abattre,
Jamais désespéré, toujours prêt à combattre.

C'était un grand guerrier : jamais las de souffrir
Pour son noble drapeau, fier pour lui de mourir ;
Pendant trois ans complets, sans repos et sans trêve,
Sur les Bleus effrayés il fit passer son glaive.

C'était un grand chrétien : fidèle au Roi du ciel
Il voulut protéger et la croix et l'autel ;
Du vieux Mathathias suivant le noble exemple,
Il défendit trois ans les ruines du temple.

C'était un grand chrétien : en face de la mort
Il demeura debout, sanglant mais toujours fort,
Disant à ses bourreaux : « Je ne suis point esclave ;
Regardez bien mon cœur ; c'est là qu'on frappe un brave ! »


Dom Joseph Roux, Souvenirs du bocage vendéen (1898)