samedi 29 mai 2010 | By: Mickaelus

Sur la naissance de Monseigneur le Dauphin, par Pierre Le Moyne

A l'occasion de la naissance ô combien désirée et attendue (comme je l'annonçais dans cet article) de Messeigneurs les Princes Louis, duc de Bourgogne, et Alphonse, duc de Berry, hier à 15h33 et 15h38, voici quelques sonnets de Pierre Le Moyne dont le thème est la célébration de la venue au monde du Dauphin, qui se veut un don pour la France entière et ceux qui lui sont restés fidèles en ces temps difficiles, ainsi qu'une promesse de victoire future contre ceux qui nous éprouvent durement.

Louons Notre Seigneur pour Sa bénédiction et félicitons les heureux parents, Mgr Louis de Bourbon et surtout la Princesse Marie-Marguerite !

Allégorie relative à la Naissance de Monseigneur le Dauphin
Dédiée à Monsieur Le Noir, Lieutenant Général de Police
(Source)

***

Le ciel ne fut jamais plus serein ni plus beau ;
Tous les astres malins se sont cachés dans l'onde,
Et les brillants gémeaux, quoique l'orage en gronde,
De leurs feux réunis guident notre vaisseau.

Il nous vient de paraître un présage nouveau,
Qui promet à nos lys la conquête du monde ;
Et pour comble de biens notre astrée est féconde
Du céleste poisson qui domine sur l'eau.

Vaisseau victorieux ne crains plus le naufrage ;
En vain pour t'abîmer la mer enfle sa rage,
De tout ce qui lui vient du Danube et du Rhin ;

Tu peux bien te passer de boussole et de voiles,
Tout te porte à présent que l'astre du Dauphin,
S'est joint pour te régir à tes autres étoiles.

***

Souffrons encor un peu, forçons notre raison,
D'attendre avec honneur la fin de la tempête :
Déjà le vent du nord baisse l'aile et la tête,
Et celui du midi s'enfuit de l'horizon.

Il doit bientôt venir une heureuse saison,
Qui nous amènera la Paix par la conquête ;
La Fortune y consent, et Bellone s'apprête,
Après cet exploit fait à rentrer en prison :

Quelque mauvais démon qui menace la France,
Un astre nous est né qui nous donne assurance,
D'une tranquillité qui n'aura point de fin :

Effaçons de nos maux les tragiques histoires,
Mon Roi ne laisse rien à vaincre à son Dauphin,
Et son Dauphin vaincra par la paix ses victoires.

***

Prépare des lauriers, dresse des feux de joie,
Chère France déjà tout cède à ton Dauphin ;
Le lion de l'Ibère abandonne sa proie,
Et l'aigle impérial se cache au bord du Rhin.

Le serpent des Lombards qui mordait la Savoie,
De frayeur en vomit les dents et le venin ;
Et l'anglais léopard dedans la mer se noie,
De peur de faire à terre une plus triste fin.

Alcide encor enfant étouffa deux couleuvres,
Et commença par là ses héroïques œuvres,
Qui mirent ses lauriers plus hauts que ceux de Mars :

Et ton prince à sa honte arrivant dans le monde,
Défait d'une vertu qui n'a point de seconde,
Le serpent, les lions, l'aigle et les léopards.


Pierre Le Moyne, Poésies (1650)